468                         HISTOIRE DE LA TAPISSERIE
En exigeant du traducteur une copie servile de leurs tableaux sans connaître suffisamment les exigences et les limites du mode d'inter­prétation, ils réduisent le tapissier à un rôle insipide et subalterne qui le décourage en le rabaissant. Nous ne doutons pas que l'in-lluence du décorateur éminent, actuellement chargé de la direction artistique des travaux et de la surveillance de l'école, ne pro­duise de salutaires résultats. S'il devait en être autrement, il fau­drait désespérer de notre glorieuse manufacture.
Certains auteurs ont vanté comme une excellente mesure la substitution du traitement fixe au travail payé à la tâche. Nous sommes loin de partager cet enthousiasme. Y aurait-il moyen de revenir aujourd'hui à l'ancienne organisation, de confier les des­tinées des Gobelins à un entrepreneur l'exploitant à ses risques et périls, sous la surveillance immédiate de l'État, et avec'une subvention suffisante? La question est trop grave pour être légè­rement tranchée ; mais elle mérite d'attirer l'attention de ceux qui se préoccupent de l'avenir de nos manufactures nationales. Nous croyons, pour notre part, qu'il y a quelque chose à tenter dans ce sens.
Ne pourrait-on pas aussi laisser aux tapissiers, qui tous ont été astreints à un long apprentissage, plus de liberté et d'initiative pour l'emploi des couleurs, dont ils connaissent mieux l'effet et la soli­dité que personne? .
N'y aurait-il pas Heu enfin d'adjoindre à l'école spéciale où se recrutent les ateliers de la manufacture des pensionnaires choisis parmi les jeunes gens les plus intelligents d'Aubusson, qui vien­draient se perfectionner dans cette sorte d'école supérieure pour fournir ensuite à l'industrie,privée des chefs d'atelier rompus à toutes les difficultés, initiés à tous les secrets de leur profession?
Il est encore un point d'administration intérieure dont il convient de dire quelques mots. Depuis Louis XIV, les tapissiers sont logés dans la manufacture ; presque tous ont la jouissance d'un jardin d'une certaine étendue qui les attache à leur position, si modeste qu'elle soit, en leur procurant un bien-être que connaissent peu les habitants de Paris, et en les dispensant de chercher à l'exté­rieur des distractions coûteuses. Le personnel de la manufacture forme ainsi une grande famille, fière de son.passé et fort attachée à la tradition et à la gloire de ses prédécesseurs.
Or les bâtiments, dont beaucoup datent de Louis XIV, tombent